UN MESSAGE PRIVE RESTE PRIVE BIEN QU’ENVOYE A PARTIR D’UNE MESSAGERIE PROFESSIONNELLE
- CONSEILRH24
- 9 oct. 2024
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LICENCIEMENT ABUSIF

Cour de cassation 23.11.860 du 25 septembre 2024 https://www.courdecassation.fr/decision/66f3a7dc5c2cfc5a084ac60f
Faits :
· Un salarié, embauché le 02 novembre 2004, par la société SPBI, occupe le poste de Chargé des relations presse et évènementiel, statut cadre, CC Navigation de plaisir.
· Expatrié au Brésil d’octobre 2022 à juillet 2017. Il est expatrié aux USA, à compter d’août 2017. Il devient Directeur des Ventes. Son contrat de travail français est alors suspendu pendant la période d’expatriation.
· En février 2019, lors d’un salon nautique à Miami, le salarié fait des avances à une cliente américaine, venue pour acquérir un bateau haut de gamme.
· Informé de ce fait, le 02 mai 2019, la société SPBI le convoque à un entretien préalable en vue d’un licenciement.
· Licenciement prononcé le 28 mai 2019, pour faute grave suite à atteinte au renom de l’entreprise et plus globalement à celui du Groupe et au préjudice financier qui en a découlé, par la non-vente dudit bateau de luxe.
· Le 04 juillet 2019, le salarié saisit le conseil prudhommal de la Roche Sur Yon, pour licenciement abusif et demande des indemnités liées à ce licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Décision :
· Le 07 décembre 2020, le conseil des prudhommes juge :
o Le licenciement est bien caractérisé car il repose sur une faute grave
o Déboute le salarié de toutes ses demandes
· Le 04 janvier 2021, le salarié interjette appel
· Le 08 décembre 2022, la Cour d’Appel de Versailles, juge :
o Que les messages envoyés au travers d’un compte de messagerie privé, bien que l’ordinateur soit professionnel, restent privés ;
o Que ces mails n’avaient rien de répréhensibles pénalement, ne contenaient aucun contenu excessif, diffamatoire ou injurieux ; qu’il n’y avait aucun harcèlement sexuel ; que l’interdiction de blagues et de commentaires à connotation sexuelle portait atteinte à la liberté d’expression du salarié ;
o Qu’un motif tiré de la vie personnelle d’un salarié ne peut justifier, en principe, le licenciement disciplinaire, sauf à prouver qu’il constitue un manquement de l’intéressé à une obligation découlant de son contrat de travail,
o Qu’un échange à caractère privé, avec d’autres personnes, au moyen de sa messagerie professionnelle, installée sur son ordinateur professionnel, et ce sans rapport avec son activité professionnelle, n’est pas caractéristique d’une faute professionnelle,
o Qu’enfin, l’employeur peut apporter des restrictions à la liberté d’expression de son salarié à la condition que cette restriction soit justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché ;….
· Le licenciement est donc réputé abusif
· La société SBPI se pourvoit en cassation
· Le 25 septembre 2024, la Cour de Cassation rejette le pourvoi. Elle confirme le caractère abusif de ce licenciement.
Conseil RH 24 (Conseil en gestion RH, formatrice en droit du travail) vous informe :
« La jurisprudence française précise :
L’employeur doit consulter et informer les salariés et leurs représentants sur les méthodes mises en place pour le contrôle de la messagerie professionnelle
Il doit déclarer ces mesures à la CNIL : outils de mesure de la fréquence, outils d’analyse des pièces jointes, filtres anti-spams, modalités d’archivage, durée de conservation…
Le salarié peut utiliser sa messagerie professionnelle à des fins personnelles
En effet, un employé peut se servir de sa messagerie professionnelle à des fins personnelles, mais de façon modérée. La CNIL (Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés) précise à ce propos que “l’utilisation, sur les lieux de travail, des outils informatiques à des fins autres que professionnelles est généralement tolérée. Elle doit rester raisonnable et ne doit pas affecter la sécurité des réseaux ou la productivité de l’entreprise ou de l’administration concernée.” La CNIL souligne aussi que la mention “personnel” doit être précisée dans l’objet du courriel. Ainsi “tout ce qui n’est pas identifié comme “personnel” est réputé être professionnel de sorte que l’employeur peut y accéder librement. »
Photos libres de droit – Pexels.
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